In another life || Forty FLASH

Comme tous les soirs, Ace avait enfilé sa plus belle chemise et s'était équipé de son plus beau sourire pour charmer les client‧e‧s qui viendraient le voir au bar où il servait depuis plusieurs mois. Travailler pour un homme plus jeune que lui ne le gênait pas vraiment, au contraire il s'en sentait même plus proche. Mais il était tout de même perturbé par les regards que les gens posaient sur chacun d'entre eux, se demandant toujours s'ils avaient fait quelque chose de mal même s'il l'oubliait dès qu'une jeune femme venait le charmer ou qu'un homme s'acharnait à lui soutirer son numéro de téléphone.

Être à la tête d’un prestigieux casino n’était pas de tout repos et comme son frère, défunt patron l’ayant précédé, il tenait à cette réputation d’or que détenait ce dôme du vice. Comme tous les endroits réputés de la ville, il demandait un personnel exemplaire, soigné et prêt à se soumettre aveuglément aux heures supplémentaires. Évidemment, c’était le cas de certains et d’autres beaucoup moins, cependant, parmi eux, quelqu’un se démarquait d’une loyauté infaillible et il savait qu’importe la situation délicate, il pouvait compter sur lui. Ce soir, l’ambiance était détendue et les festivités étaient accommodées à la musique adéquate. Alors, après avoir clos un dossier, seul, enfermé entre les murs de son bureau, il s’intégrait à la salle principale et comme souvent, il venait prendre place au bout du bar, adressant un signe de main à son employé pour l’inciter à lui servir sa boisson habituelle, un whisky sec.

La drague en place avec une cliente, le blond laissa tout tomber dès que son bos s'approcha du bar, venant s'y poser pendant que Ace préparait déjà le verre. Ce dernier préparé, il adressait un dernier sourire à la jeune femme avant de venir à la rencontre de Forty, le sourire aux lèvres. Bonsoir patron, vous avez passé une douce soirée ? Il déposa le verre sur le comptoir alors que son regard s'ancrait dans celui de son cadet, la moue charmeuse.

Assis là, il observait son employé user de ses charmes pour pousser une jolie fille à la consommation, ce qui semblait finalement fonctionner jusqu’à ce qu’il ne vienne préparer sa commande, non sans une touche de séduction maladive qui semblait lui coller à la peau. Forty s’emparait de son verre pour en goûter la saveur caramélisée, ❝ —pas aussi douce que la tienne j’ai l’impression ❞ rétorquait-il le plus simplement du monde, ❝ —alors c’est de cette manière là que tu parviens à fidéliser la clientèle ? je devrais probablement songer à t’augmenter ❞.

Un bref éclat de rire venait répondre à la remarque de Forty alors que l'australien levait les yeux vers le ciel, sachant bien que les client‧e‧s ne venaient pas le voir seulement pour son talent dans l'art de confectionner des cocktails adaptés à leurs goûts. Il faut croire qu'il n'y a pas que les cocktails de votre établissement qui peuvent réussir à les séduire. Mais je ne dirais pas non à une augmentation. Il venait agrémenter ses paroles par un clin d'œil alors qu'il s'accoudait sur le comptoir. J'espère que vous n'avez pas travaillé au point d'en avoir mal à la tête, patron...

Les dires de son vis à vis lui soutirait un léger rictus qui marquait inévitablement la commissure de ses lèvres, de ce fait il venait le dissimuler derrière son verre, ❝ —j’y réfléchirais dans ce cas ❞ déclarait Forty avant de boire son verre d’une traite, faisant glisser ce dernier sur le bar, signe qu’il en redemandait à nouveau. ❝ —Malheureusement si, mais c’est pourquoi je suis assis là, le paysage m’enlève toutes migraines ❞ qu’il énonçait d’un ton plus rauque qu’à l’accoutumé, lui aussi, savait jouer, ❝ —et si tu veux cette augmentation, tutoies-moi, tu me ferais profondément plaisir ❞.

Fier d’avoir su soutirer un rare sourire à l’homme face à lui, il était heureux de savoir qu’il allait vraiment réfléchir à la promotion tandis qu’il réceptionnait le verre. Le remplissant du même liquide, il venait lui rendre presque aussitôt alors qu’il osait un regard amusé vers lui. Alors il ne vous suffit que d’observer un beau paysage pour ne plus souffrir, patron ? Il était légèrement amusé avant de sourire un peu plus. Si c’est ce que tu veux. Et la curiosité venait l’enlacer de sa douce présence quand il osa une autre question. Puis-je savoir ce qui t’as donné mal à la tête ?

Sa question aurait pu le faire sourire à nouveau, s’il ne tenait pas tant à sa réputation frigide. Forty saisissait son verre désormais abreuvé de sa boisson alcoolisée favorite pour s’en délecter d’une gorgée, sans même rétorquer, laissant simplement planer le suspens intégral. L’entendre le tutoyer lui faisait étonnamment plaisir, notamment parce qu’ici, personne n’y était autorisé mais l’exception lui faisait beaucoup de bien. Son employé le questionnait à nouveau, alors il posait son verre sur le bar et analysait un court instant le visage voisin, ❝ —des contrats délicats, mais je n’en parlerais pas ici, peut-être un de ces jours si tu te montres digne d’entrer dans mon bureau ❞ lui confiait-il, le plus sérieusement du monde, ❝ —en attendant, considère que je suis un client comme les autres, je veux te voir à l'oeuvre et connaître ton secret ❞.

Il était habitué à croiser de nombreux types de client.e.s depuis qu’il travaillait derrière ce comptoir, mais son patron restait le préféré. Alors il prenait plaisir à le servir, cherchant à en apprendre plus sur celui qui l’avait engagé. J’espère m’en montrer digne rapidement, alors. Il doit y avoir de nombreuses surprises dedans, je suppose ? Et sa demande venait le perturber alors que sa tête se penchait sur le côté. Est-ce une façon de me demander de te séduire ? Parce que c’est ça, mon secret.

Le temps d’un instant, ses iris tombaient sur le liquide brun et distraitement, il s’amusait à retracer de son index le contour de son verre, ❝ —tu n’as même pas idée à quel point ❞ affirmait-il avant d’élever les regard vers son semblable lorsque ce dernier l’interrogeait sur ses intentions. ❝ —Je ne te le demande pas Ace, je l’exige ❞ qu’il rétorquait, curieux de connaître les talents de cet employé qui, au delà de son travail visant l’excellence, semblait avoir dans sa manche, plus d’une façon d’attirer la clientèle jusqu’à lui.