#1 (Ace) Better hurry 'cause I'm leaving soon

Ta colère était vive, venant se mélanger à cette tristesse que tu ne semblais pas quitter depuis des jours et jours. Cela te fatiguais, d’ailleurs, de ne pas réussir à reprendre le contrôle de tes émotions aussi facilement qu’avant. Tu avais subi trois crises de larmes ces derniers jours, toujours devant la même personne, et t’avais l’impression de sombrer petit à petit dans une instabilité dont tu aurais du mal à te sortir. Même si tes crises avaient en point commun le fait de finir dans les bras du même homme, celui pour qui ton cœur ne cessait de battre même après tout ces mois de séparation, tu ne pouvais malheureusement pas dire qu’il en était le responsable. Bien que tu aurais sans doute préférait cela plutôt que la mort d’un de tes meilleurs amis. Si ton envie de vengeance était apparu dès que t’avais appris pour sa disparition, elle était vite redescendue lorsque t’avais su que tu ne pourrais rien faire puisqu’il s’était ôté la vie de lui-même. La seule chose que tu pouvais te permettre était de te rendre à son enterrement, loupant ainsi le repas de famille régulier que ta mère organisait. Heureusement pour toi, Leith avait accepté de te couvrir et était même venu te réconforter un peu jeudi. Être de nouveau proche de lui t’avais fait extrêmement de bien même si tu avais du mal à l’avouer.

Il n’avait fallu que quelques messages de la part de ton petit-frère, ton petit goyangi, pour que la colère ne vienne se mêler à ta tristesse. Elle prit même le dessus alors que tu fulminais en rejoignant ta voiture. Charles, cet homme qui était devenu votre beau-père en épousant votre mère, avait osé lever la main sur Leith et tu ne pouvais pas supporter cette idée. T’avais toujours fais de ton mieux pour protéger et éloigner du plus possible ton frère de cette pourriture, ne pouvant pas accepter l’idée que ce dernier pourrait s’en prendre à lui s’il venait à en avoir l’occasion. Et il n’y avait fallu qu’une seule absence pour que cet enfoiré de juge frappe Leith. Te promettant de lui faire payer, en l’absence de votre mère bien sûr, tu mis de côté ta haine contre l’américain pour te concentrer sur l’endroit où pourrait se trouver ton cadet. Aidé par Minki, qui indiqua une manière de le retrouver rapidement, tu découvris bien assez vite l’endroit où Leith s’était réfugié. Roulant plus vite que la vitesse autorisée, ta voiture se glissa rapidement dans les rues de Brooklyn pour rejoindre l’immeuble où le logement secondaire de ton ami Isaac se trouvait.

La voiture garée, tu pris le temps de te calmer légèrement. Tu ne voulais pas effrayer le brun, sachant très bien que tu pouvais facilement faire peur lorsque tu te laissais aller à tes excès de colère. Alors, prenant quelques minutes de calme dans ton véhicule, tu en profitas pour te débarrasser de ta cravate et de ta veste de costume. Tu remontas même tes manches, les roulant sur elles-même pour qu’elles ne puissent pas te gêner, avant de descendre et de rejoindre le bâtiment. Te remerciant intérieurement d’écouter ton ami lorsqu’il parle, tu tapes rapidement le code déverrouillant la porte d’entrée avant de rejoindre l’ascenseur. T’étais jamais venu ici mais tu savais très bien à quoi servait ce logement, te donnant l’impression d’être totalement perdu alors que tu comprenais que ton petit-frère y venait souvent vu qu’il s’était réfugié ici. Mais tu ne ferais aucun commentaire aujourd’hui, te doutant que ce n’est ni l’endroit ni le moment, alors que tes pas te guident jusqu’à la porte du logement qui n’est pas fermée. Rentrant silencieusement, tu la refermes derrière toi avant de chercher la silhouette de ton cadet. Tu finis par le repérer sur le canapé, ses jambes ramenées contre son torse et son visage triste venant te briser le cœur. T’approchant rapidement, et sans lui laisser le temps de réagir, tu prends place à ses côtés et l’attire dans tes bras. “Eh… Je suis là, Leith.” Tu poses tes lèvres sur son front, fermant les yeux en tentant de retenir une fois de plus ta colère. T’as remarqué sa joue qu’est encore rouge, ses yeux gonflés par ses larmes, et ça te donnes envie d’aller faire payer le salaud qui l’a fait pleurer. Mais tu dois d’abord t’occuper de ton petit-frère, être là pour lui comme il l’a été pour toi. “Comment tu te sens… ?”

T’as perdu l’habitude d’être si proche de lui, n’ayant toujours pas compris la raison de cela d’ailleurs, alors l’avoir dans tes bras te rassure légèrement. Car ça veut dire que tu seras là pour lui quoiqu’il se passe et qu’il doit le ressentir, le savoir. Ton petit frère a toujours été l’une des priorités dans ta vie, l’une des seules personnes qui pourraient se vanter de connaître ton côté protecteur bien que tu as souvent l’impression qu’il le dérange plus qu’autre chose. L’une de tes mains glisse jusque ses cheveux, les caressant du bout des doigts comme pour chercher à le rassurer. Le laissant s’éloigner, le voir dans cet état te brises le cœur. Mais le pire sont ses mots, cette culpabilité que tu ressens dans sa voix et qui ne devrait pas s’y trouver. T’apprêtant à répondre, il ne t’en laisse pas le temps puisqu’il continue sur sa lancée. Et ça déclenche tes propres larmes, ne pouvant supporter de le voir dans cet état. Alors t’attrapes doucement ses mains, voulant l’inciter à te regarder, alors que tu prends une voix douce. “Eh… Est-ce que je t’ai déjà dis que tu me faisais chier ? Je pense pas et ce n’est pas le cas, de toute façon.” Tu l’attires de nouveau contre toi, l’enlaçant en faisant en sorte que sa tête repose contre ton épaule. “T’es mon petit frère, Leith. Et, quoiqu’il se passe, t’es ma priorité. Je pourrais être à l’autre bout du monde que je lâcherais tout pour venir t’aider, d’accord ?” Reprenant tes caresses dans ses cheveux, tu en entames aussi dans son dos avant de reprendre la parole. “Et Charles n’avait aucune raison de te frapper… Il est pas notre père et a tendance à l’oublier trop facilement. Mais j’irai en discuter avec lui.” Et peut-être le frapper une fois ou deux, au passage. Lui faire comprendre qu’il n’a pas le droit de lever la main sur ton cadet. Mais c’est pas ta priorité pour le moment. T’écartant légèrement, assez pour pouvoir voir sa joue, tu grimaces doucement. “Tu veux mettre de la pommade ou pas ?”

La colère et la tristesse, deux émotions qui se battaient continuellement dans ton esprit depuis plusieurs jours, ne cessaient de chercher à avoir le contrôle l’une sur l’autre alors que tu venais de retrouver ton petit frère. Tu pouvais accepter plein de choses habituellement mais pas cette fois-ci. Que quelqu’un se permette de le frapper, de le faire pleurer, c’était tout ce qu’il fallait pour te donner des envies de meurtres. Envies que tu contenais encore un peu puisque ce n’était ni l’endroit ni le moment pour les exprimer. Le ramenant dans tes bras, tu lèves les yeux au ciel en entendant sa remarques, reniflant un peu avant de reprendre la parole. “Je sais tout de même ce qui est chiant pour moi ou non, tu ne penses pas ?” Ta voix se fait douce alors que tu tentes de lui faire comprendre qu’il est ta priorité. Et tu exprimes aussi ta colère par rapport à Charles, annonçant que tu iras lui parler, avant de t’intéresser de nouveau à Leith. Sauf que tu ne comprends pas la réaction de ce dernier, le laissant attraper tes mains alors que tu l’observes en fronçant les sourcils. Mais il se fige à l’entente de ses mots, ne répondant pas tout de suite même s’il n’en a de toute façon pas l’occasion. Son regard, toujours embrumé par les larmes coulant sur ses joues, descend vers le sol alors qu’il assimile les informations que vient de lui donner Leith. Il n’a aucune raison de parler “d’un autre meurtre”. Cherchant tes mots, tu serres doucement ses mains dans les tiennes, avant de relever ton regard vers lui. “Comment ça.. Commettre un autre meurtre ? Tu t’es mis cette idée en tête où ?” Ou, plutôt, qui a été lui balancer que t’as déjà perdu le contrôle à deux reprises ?

T’as l’impression que ça fait des lustres que tu n’as plus eu ton petit frère dans tes bras. Que tu n’as pas pu jouer ton rôle de grand-frère avec “l’autorisation” de Leith. C’est même presque étrange de retrouver cette place mais t’en es un peu heureux. T’en veux juste à Charles d’être la raison de ce rapprochement avec ton cadet. Il n’aurait jamais dû lever la main sur lui et tu lui fera comprendre. Mais t’as déjà une priorité actuellement. Tentant de rassurer Leith, mettant ton propre mal-être de côté, tu souris faiblement lorsqu’il capitule. “T’es aussi têtu que moi…” C’est pas une insulte, loin de là. Parce que t’es fier de voir qu’il se laissera jamais convaincre facilement même si cela peut créer des sources de conflits entre vous. Sauf que tu perds vite ton sourire, tu perds tout à vrai dire. Car un élément vient d’apparaître subitement entre vous. Il n’y a plus que les larmes présentes sur tes joues qui viennent témoigner que tu es toujours présent. Mais ton esprit est ailleurs, cherche quand est-ce qu’il aurait pu apprendre que tu as les mains couvertes d’un sang qui n’est pas le tien. Tu cilles à peine quand il retire ses mains des tiennes, ton regard les suivant instinctivement. Et tu sens ton cœur se briser lorsqu’il te donne l'origine de ses savoirs. “Leith…” Tu t’apprêtes à parler, à lui expliquer, mais il reprend la parole aussitôt. Et tu comprends petit à petit. Tu trouves enfin une réponse à toutes tes questions. T’es la source de ses changements, de ses bêtises. Et c’est pire qu’un couteau dans le cœur. T’es un monstre, Ace. Un monstre pire que ton beau-père puisque t’as détruis ton frère sans même le savoir. Tu sais même pas quoi dire, encore moins ce que tu dois faire. Mais t’agis tout de même, te levant pour t’éloigner de lui. T’es comme un poison pour lui et tu t’en rends compte. “T’aurais jamais dû assister à ça.” Ta voix est soudainement froide alors que tu comprends que tu ne peux rien changer. Un soupir quitte tes lèvres alors que tu tournes en rond, faisant les cent pas. Tu passes une main dans tes cheveux, cherchant ce que tu pourrais faire, avant de venir te laisser tomber à genoux devant Leith. L’hésitation se ressent jusque dans tes gestes alors que tes mains se posent sur ses genoux. “Leith… Pourquoi est-ce que tu ne m’en as jamais parlé ?”

Sous le choc, tu n’arrives toujours pas à croire que ton petit frère connait une partie de ta vie. Celle que tu aurais souhaité lui cacher toute la vie si tu pouvais. Une partie si violente que, tu le sais, elle en est traumatisante. Ce n’est pas pour rien que, en temps normal, tu revêts ce masque de loup qui te colle si bien à la peau. Sauf que c’est une violence que Leith ne devait pas voir et ça te tue de le savoir. La tristesse présente est remplacée peu à peu par la colère et l’angoisse. Car tu comprends que t’es le seul responsable de son éloignement. Que c’est le monstre que tu es qui a provoqué ce changement dans sa personnalité. Et tes mots s’échappent de tes lèvres plus vite que tu ne le voudrais. “Non… Tu n’aurais jamais dû voir ça.. Ce n’est pas quelque chose auquel tu devais assister.” Et ta voix est trop froide, plu que ce que tu aurais voulu alors que tu finis par tomber à genoux devant lui. Tu pourrais t’excuser, le supplier de te pardonner cela et d’oublier. Mais t’y penses pas. T’es surtout concentré sur le fait qu’il garde ça pour lui depuis plus d’un an et qu’il ne t’en as jamais parlé. Et, bien sûr, son impulsivité -qui est tienne aussi- le fait réagir autrement que ce que tu aurais voulu. Relevé de force, tu te laisses secouer par lui sans rien dire. T’as même pas la force de te défendre, voulant le laisser exprimer ce qu’il ressent. “Oui…” Les larmes aux yeux, l’une coulant le long de toa joue, tu relèves le regard vers lui sans rien ajouter de plus pour le moment. T’es détruit dans le fond et, malgré le minime espoir que tu conservais au fond de toi, tu comprends que tout est fini maintenant. Les bras pendant le long du corps, t’as l’air d’être un être sans esprit alors que tu te mets de nouveau à pleurer silencieusement. “Je.. Je suis désolé. Mais tu aurais dû m’en parler.. Tu aurais dû me dire ce que tu avais vu…” Tu aurais pu lui expliquer, lui dire que cet homme s’en prenait aux femmes et que tu ne pouvais accepter le fait que quelqu’un abuse d’un être plus “fragile”.