La grande pomme ne dort jamais. Alors que tous pensaient que le calme reviendrait sur la ville et que les gens se préparent au festival à venir, c'est une série vols qui font progressivement la une des journaux locaux. Nul n'a encore réussi a appréhender les auteurs de ces délits ou définir leurs cibles de prédilection. Faites bien attention à vous.
Marla, elle était à la recherche d’un second emploi pour l’associer à son poste au cabaret Euphoria. Après avoir versé des larmes à l’accueil, Blanche lui avait donné sa chance en tant que chanteuse et si la brune était ravie d’avoir enfin de l’argent, il lui en manquait pour pouvoir se payer un appartement, associé aux factures qui allaient de paire. Elle ne perdait pas espoir, épiait les recherches d’emplois et se présentait un peu partout, parfois même sans lire les descriptions, parce qu’elle ne pensait qu’à l’argent, Marla. Alors, lorsqu’un patron avait appelé au cabaret pour lui donner une date d’entretien, la brune s’était mise en tête d’emprunter quelques vêtements que portaient certaines danseuses lors des représentations ou des répétitions. Ceci dit, elle était tellement occupée à être elle qu’elle s’était contentée de son jean troué habituel, d’un débardeur noir sous lequel l’on devinait sa poitrine sans soutien-gorge et ses converses usées par le temps. La tignasse lâchée, à chaque pas, elle profitait de cette délicate odeur de vanille qui émanait de sa peau, la senteur fraîche d’une lessive et d’une chevelure soyeuse, glissant le long de ses épaules sveltes. Des choses que l’on oubliait lorsque le ciel nous servait de toit et que le bitume accueillait les corps échoués, épuisés par une trop longue errance. Elle misait tout sur son minois agréable, sur ses formes galbées et son sourire étincelant, puisqu’elle ignorait qu’elles étaient ses autres avantages, Marla. Longue marche (mise à mort) jusqu’à l’endroit : elle ne s’attardait pas sur la façade et se contentant de franchir le seuil de la porte d’entrée, une main rivée sur son sac en toile noir. « Bonjour, je suis là pour un entretien. » Qu’elle glissait à l’accueil, avant de se faire guider dans la salle, puis de s’installer sur un fauteuil en velours. Face à elle tenait une barre de strip-tease et une femme était déjà occupée à performer, sous le regard curieux de la jolie. Si insouciante que Marla ne percutait pas encore ce qu’était ce lieu ni dans quoi elle venait de mettre les pieds. Simplement admirative de cette beauté tamisée, ce même sourire étincelant aux lèvres, celui qui exhibait ses quenottes.
Nash n'était pas du genre à faire attention aux apparences d'un employé de Bacchus. Après tout, c'étaient tous des strip teaseurs, serveurs ou barman, pas besoin d'être hyper classe ou de sortir d'une grande école. Tant que la personne avait un physique avantageux et du charme, il prenait. Surtout que, là, il avait pas la tête à ça. La veille son corps s'était uni à celui d'un homme. Un homme. Et il comprenait pas pourquoi. Son attirance allait aux femmes pas vrai ? Il pouvait pas changer d'orientation sexuelle, tout comme il refusait d'être bi. Mais avait-il vraiment le choix ? Nash refusait de répondre à cette question. Alors il continuait de nier l'évidence, la tête penchée en arrière, profitant de la fellation qu'une femme était en train de lui faire dans les loges. Jusqu'à ce que la porte s'ouvre et qu'un employé l'informe qu'une candidate était arrivée. Fais la venir ici. Et le démon se relevait une fois l'homme parti, renfilant son boxer et un jean noir mais laissant son torse nu. A peine le verre de whisky servi que la porte se rouvrait, laissant entrer une brune, yeux bleus envoûtants. Assis toi. Et le verre d'alcool qu'il te tendait, la chaise à côté qu'il t'indiquait tandis que la strip teaseuse légèrement vêtue s'en allait. Tu peux le voir qu'il scrute chacun de tes faits et gestes, qu'il tente de deviner qui se cache derrière tes pupilles couleur océan. Observe le instaurer un silence, tester ta patience. T'as quel âge ? Parce qu'il est hors de question qu'il engage des mineurs et, il doit l'avouer, il a pas lu ton cv. Et ses prunelles ne te quittent pas tandis que ses pas l'approchent de toi. Mais, surtout, tu viens faire quoi ici ? L'homme s'accroupit devant toi, est-ce que sa proximité te gêne ? Car c'est ce qu'il cherche. Lui mens pas, car il est doué pour déceler la vérité.
Seulement quelques secondes d’attente à admirer la performance de la jeune femme que l’on venait chercher la belle Marla pour la mener jusqu’à une pièce plus intimiste. Elle faisait tache au milieu de la décoration, mais n’y faisait plus attention, certainement habituée à ne pas s’accorder, à ne pas coller avec ce qui l’entourait. Cependant, le soleil ne perdait pas sa risette scintillante, illuminant même les ténèbres, jouant à la compétition avec les étoiles. Elle ne faisait pas attention à la tenue peu apprêtée de l’homme qui s’approchait d’elle, lui ordonnant presque de s’asseoir. Sans broncher, sa croupe s’aplatissait sur la chaise, immédiatement, croisant ses chevilles ensemble en délaissant son sac de toile. La brune sentait une certaine tension et avalait difficilement sa salive, les paumes déposées sur ses cuisses aplaties sur le siège. « 25 ans… » Qu’elle peinait à articuler, déstabilisée par la prestance du brun, à ne jamais la lâcher du regard, scrutant la moindre de ses réactions, à l’affût de chaque détail pouvant lui permettre de cerner la petite brune. Proximité imposée et les corps qui se frôlaient, Marla baissait les yeux, mal à l’aise, embarrassée par cet entretien étrange, à des lieux de ceux passés jusqu’à présent. « J’ai besoin d’argent. » La voix fébrile qui résonnait, elle aurait pu se mettre à pleurer, Marla, mais tentait de mettre de côté ses émotions pour ne pas faire pitié (pas comme la dernière fois avec Blanche). « S’il vous plaît… » Elle murmurait, Marla, peureuse, effrayée à l’idée de parler trop fort et de ne pas savoir ce qui pourrait se passer par la suite. La poitrine soulevée au rythme de son souffle saccadé, elle maintenait son regard apeuré dans celui de Nash, intimidée, le visage baissé et les doigts qui serraient le tissu de son jean, nerveuse.
25 ans. T'avais largement dépassé la majorité, donc. Tant mieux. Tes chances d'être engagée s'agrandissaient légèrement, comme le sourire sur le visage de Nash. Et, devant la fragilité de ta voix, l'homme ne pouvait s'empêcher un rire, presque moqueur. Une femme au manque de caractère, facile à manipuler. Pile ce qu'il lui fallait. Car, si certains clients aimaient les danseuses à la personnalité enflammée, d'autres préféraient celles plsu discrètes. Plus soumises. Nash, lui, s'en fichait. Tant que tu pouvais lui faire gagner de l'argent, il te trouvait de l'intérêt. Satisfait par la réponse, le démon se levait, tournant le dos, retournant se servir un verre. Et t'en veux combien de l'argent ? Comprends qu'il te ne donne que l'impression du choix. Si tu te demandes trop, il se fera un plaisir de rompre tes espoirs. Par contre, si tu n'exiges pas beaucoup, alors il aura toujours la satisfaction de t'arnaquer. Puis de t'exploiter. Et de te briser si tu fais mine de résister. Mais surtout t'es disponible quand ? Reposant son verre sur la table, il croisait les bras, le regard rivé sur toi. Pas pour te juger, non, Nash avait l'impression de t'avoir déjà cernée. S'il t'observait aussi intensément, c'était plutôt pour s'assurer que tu ne fuyais pas, que tes opales ne dérivaient pas vers la porte. Car, si tu voulais t'en aller, c'était le moment ou jamais. Alors, Marla, est-ce que t'avais les tripes pour passer un pacte avec le diable ?
Marla, elle serrait nerveusement son jean, ses cuisses, les prunelles larmoyantes lorsque Nash s’approchait de sa belle gueule, rivant ses mirettes dans les siennes, d’un bleu si clair que l’on croirait voir la mer qui s’agitait, un ciel d’été dégagé de tous nuages et précipitations. Elle respirait mieux lorsqu’il s’éloignait, détendait ses épaules en laissant aller son souffle, jusqu’à présent retenu, de peur de froisser l’homme qui se tenait en face d’elle. Le dos moite au même titre que ses paumes, Marla, elle avait presque la tête qui tournait, sur le point de fondre en larmes tellement la pression l’angoissait. Cela ne faisait que quelques minutes et elle ressentait déjà l’envie de s’enfuir, sauf que son ambition la rattrapait bien vite, estimant qu’elle pouvait prendre sur elle, qu’elle ne croiserait pas souvent le patron. « Ce que vous voudrez, je veux juste payer mon appartement. » Qu’elle murmurait d’une voix faible et brisée, d’où émanait son lot d’incertitude, maintenant que sa confiance venait d’être réduite au néant. « Je suis disponible tous les jours sauf le Mardi, Jeudi, Samedi et Dimanche soir. » Parce qu’elle avait un autre boulot pour remporter plus, prouvant que son unique besoin était l’argent supplémentaire que pouvait lui apporter ce boulot. « Je suis prête à tout pour vous plaire. » Qu’elle glissait, à l’implorer de sa voix légèrement grave, se redressant dans une impulsion chancelante sur ses gambettes, s’approchant de quelques pas. Peut-être que dans le fond, Marla, elle misait tout sur son physique harmonieux, sa gueule, à le fixer de ses prunelles transperçantes.
Ce que vous voudrez. Faut pas lui dire ça Marla, pas si tu veux éviter de te faire exploiter. T'en appelles peut-être à sa bonté, à sa raison, mais le problème c'est que Nash ne connait pas tout ça. Non, il se fout de te faire trop travailler, de pas te payer assez. Tant que tu danses pour lui et que tu fais pas de scandales, tout va bien. T'auras le strict minimum. Pas plus, mais sûrement moins certains mois. Tout dépendra de son humeur. Et, d'un coup, y a le sourire qui se perd quand il entend les disponibilités. En gros t'es disponible que le lundi, mercredi et vendredi ? Trois jours par semaine, pas top. Mais Nash se débrouillerait pour faire correspondre au planning. Et, pendant qu'il réfléchit à la manière de combiner le tout, y a ses opales qui te voient te rapprocher de lui. La mâchoire se serre, le verre de whisky est posé violemment sur la table. Garde ce numéro pour les clients. Le ton est dur, l'intention est claire, ne le supplie pas, il déteste ça. Ne te montre pas faible devant lui, pas pour lui. Sinon c'est la porte direct. Contente toi d'être là à 19h le lundi, mercredi et vendredi soir, je t'envoie ton contrat par la poste. Voilà que Nash se détourne, remet sa chemise sans t'accorder d'attention. T'as le travail, Marla, et il peut rien te donner de plus.
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