How a small thing changes a life (ft. Minki)

La bonne humeur en rupture de stock (même si, cela étant dit, il ne respire que rarement la joie de vivre), son regard alterne entre l’écran et la route, aussi dangereux soit-il ; il est occupé à ce point, Minki. Incapable de lâcher son téléphone, par peur de rater une urgence, une autre tâche, toujours quelque chose. S’il a eu du mal à l’admettre il y a quelques jours, désormais il le sait, la fatigue l’éprend bien trop. Il suffit de voir sa moue exténuée, les cernes qui reposent sous ses yeux, son air autoritaire qui creuse encore plus ses traits, son incapacité handicapante à ne pas rester longtemps concentré. Écouter devient une corvée et la frustration le saisit de toutes parts, encore plus à l’annonce funeste : il ne pourra plus voyager aux quatre coins du monde, son corps dans l’impossibilité de suivre le rythme effréné de son quotidien. Ses doigts enserrent le volant et finalement, il se gare en trombes dans le parking de Palette. Avant de s’engouffrer à l’intérieur, il souffle un bon coup, ne voulant pas paraître pour un patron désagréable : même si tout le bâtiment est au courant, une fois que Hwang est d’humeur massacrante, il vaut mieux l’éviter. Ce soir, cependant, il y a tout de même quelque chose qui l’apaise un peu, la proposition qu’il va faire à Leslie. Un garçon (pourtant à peine moins âgé que lui) qu’il commence à réellement apprécier, le considérant même comme un ami : c’est bien pour ça qu’il en vient à lui demander de travailler dans le café dont il est le propriétaire avec Ace, bien qu’en réalité il ne va rien gérer étant donné qu’il n’a pas le temps. Son petit-ami sera donc son vrai patron et il le sait, il est entre de bonnes mains. Selon lui, c’est une occasion rêvée pour l’australien d’avoir enfin un métier stable, « convenable » et reposant. Peut-être un geste de pur bonté, il en sait rien, mais lorsqu’il aime bien une personne, il ne peut s’empêcher de se montrer (trop) dévoué. L’étage, pas le dernier bien entendu, atteint, il repère le bouclé au loin, paraissant tout aussi fatigué que lui. Son épaule en mauvais état à cause du tournoi, il semble se reposer sur une chaise et sans attendre (et surtout sans saluer la secrétaire, chose qu’il fait habituellement) il s’avance à grands pas vers lui, ne désirant pas le faire plus attendre. Leslie, qu’il déclare simplement, voulant juste lui annoncer sa présence. Il farfouille dans ses poches pendant quelques longues secondes avant de grommeler. Elles sont où ces clés- oh. Il les trouve enfin, ouvrant la porte. Voilà, allons-y. Une fois à l’intérieur, il dépose le trousseau sur le meuble, se rendant compte du bordel laissé sur le bureau, ce qui n’est pas son genre : le meuble est toujours nettement rangé, organisé, tout en ordre, le perfectionniste qu’il est ne laisserait pas de tels papiers s’empiler. Il range brièvement le tout, avant de pointer la chaise de sa main à l’australien. Une fois assis, de nouveau, il cherche et cherche à travers la paperasse et finalement, il en sort un dossier, un sur le Neuktae’s Café. Dedans, des photos de l’endroit, quelques informations, de quoi présenter ça à quelqu’un qui ne connait pas les lieux. Je sais que c’est un peu soudain, mais… je te laisse regarder ça à ton aise. Une fois fait, je te parlerai de ma proposition.

La frustration est là, celle de ne pas pouvoir se montrer prêt en toutes circonstances, ce n’est pas une entrevue des plus professionnelles, il le sait : tout ça parce qu’il est incapable de se reposer et de déléguer les tâches à d’autres, à cause de sa paranoïa. S’il n’était pas aussi fatigué et occupé, il lui aurait proposé un rendez-vous bien après leur voyage respectif, à une heure moins tardive, dans un environnement davantage ordonné. Mais là est le souci : Minki n’arrive plus à rien gérer, et ça le rend fou. Cependant, l’australien ne paraît pas embêté par ça, probablement bien plus perturbé par la proposition que la situation actuelle. Le dossier tendu, après qu’il s’est plaint du suspens, il le laisse farfouiller parmi les feuilles, son regard teinté de curiosité. Il scrute la moindre réaction, attentif à ses expressions faciales. Le posture droite, il l’observe un instant, et quand Leslie se met à parler, il se redresse légèrement, prenant note de son analyse. Un cadre chouette, hyper agréable, là où les gens se sentiront bien. Il est fier, il doit l’admettre, content que l’effet cosy se fasse ressentir. Il toussote brièvement, un peu pour se préparer à lui expliquer. Je dois t’avouer que je suis plutôt content que tu aies compris le concept du café que je compte ouvrir avec mon petit-ami. C’est ce qu’on visait, un endroit où les gens peuvent se réfugier, pour se sentir à l’aise, loin des soucis du quotidien. Comme tu le sais, il y a eu énormément d’événements… tragiques ces derniers temps, il suffit de voir notre fatigue à tous les deux. Il marque un temps de pause pour souffler, avant de reprendre. Et je m’étais dit… qu’un café dans ce genre aiderait ces personnes, tu sais ? Et du coup, ma proposition… Il prend un air un peu plus sérieux. J’aimerais t’engager en tant que serveur. Je sais que tu as une bonne expérience étant donné que tu as été un barman et… je me sens un peu mal de t’avoir embauché en tant qu’escorte. Je voudrais donc t’offrir une bonne opportunité pour que tu aies un boulot plus stable, que ce soit pour toi et ta sœur. Techniquement, je ne serai plus vraiment ton patron, juste le co-propriétaire des lieux, le vrai boss ce sera Ace. Je crois que tu connais son frère, Leith. Il se tait, désormais il attend une réponse, avant d’enchaîner dans les détails. Il espère que ça lui plaira, assurément.

Sa voix tombe dans le silence, la proposition est faite. Difficile de décrypter l’expression faciale du cadet, lui qui paraît plongé dans ses pensées, les sourcils froncés. Il se demande s’il est en train d’assimiler la nouvelle ou si tout simplement, il… cherche un moyen de refuser l’offre, probablement que Minki est un peu pessimiste sur le coup, la fatigue altérant ses émotions. Le dos droit, ses iris scrutent son visage, avant qu’il ne hausse les sourcils lorsque Leslie inspire. Les premières paroles fusent, il n’a pas mis de couteau sous sa gorge, dit-il. Il se mordille la lèvre, hésitant à répondre quelque chose face à ce constat : non, mais il aurait bien pu lui proposer un autre travail, lui qui a tant de contacts. Il se retient d’en faire une remarque, préférant écouter ce qu’il a à dire d’autre. Son faciès s’illumine un instant, le travail lui plairait. Oh, je vois, je pensais que tu allais refuser… qu’il admet. Puis, il se tait de nouveau, il y a un « mais » qui est fortement compréhensible. La paye. Il a pensé à tout et, encore une fois, sûrement qu’il fait un peu de favoritisme comparé à l’étudiante qui sera aussi une barista. Il attrape un contrat, qu’il lui tend et dès lors il reprend la parole. Tout est là-dedans, mais pour te résumer, tu gagneras vingt-deux dollars par heures. Je sais que c’est beaucoup, mais je voulais pas te donner un misérable salaire de serveur, tu mérites bien plus que ça. Il faut aussi comprendre que le soir, l’endroit devient un restaurant, mais là encore ça ne te concerne pas. A moins que tu veuilles alterner entre le travail de jour et de nuit, en réalité c’est un peu comme tu le sens. Le salaire augmente lorsque c’est de nuit. Il cherche ce qu’il pourrait dire d’autre, son cerveau fatigué ne l’aidant en rien à se montrer plus vif. Si ça te paraît peu je peux encore augmenter le salaire, ce n’est pas un problème… si ça te va, tu peux commencer à partir du… mh… je pense qu’Ace te contactera à un moment donné pour t’en parler, c’est mieux je pense. Je ne veux pas dire de bêtises. En tout cas ce n’est pas maintenant, assurément. Il se tait, de nouveau pour laisser le temps à Leslie de réfléchir à tout ça.

Un silence, durant lequel il se redresse, ne voulant pas paraître trop fatigué – même s’il est trop tard, assurément. Sa posture droite comme à son habitude, il observe l’australien réfléchir longuement. De nouveau, il a encore ressenti ce besoin de le guider. D’une certaine manière, il sait qu’il est bien plus présent que ça dans sa vie, qu’il change de comportement avec lui, qu’il n’est plus ce Minki un peu condescendant. Peut-être est-ce ainsi maintenant, dès qu’il laisse quelqu’un entrer dans sa vie, il devient dévoué, beaucoup trop. Est-ce un défaut ou une qualité, il n’en sait rien. Finalement, il parle, le salaire est déjà bien trop élevé à son goût et le brun aborde une moue peu convaincue, ne cherchant pas à le contredire. Un autre temps de pause et le voilà à reprendre. Son visage s’illumine, il accepte, non sans une remarque made in Leslie. On risque la faillite sans toi, c’est sûr, qu’il rétorque, amusé. Content que tu acceptes, ajoute-t-il plus sérieusement. Il écarquille faiblement les yeux quand il se montre reconnaissant, agréablement surpris, sans comprendre d’où lui vient ce ressenti face à ça. Sûrement qu’il est content de l’aider et que ça lui fasse plaisir. Il esquisse un sourire bref, l’un des rares, puis il répond. C’est normal. Au moment où il veut conclure le conversation, il se rappelle de quelque chose d’essentiel et aussitôt il s’élance : Oh au fait. J’ai quelque chose d’important à te demander… tu vois, je… hm. Est-ce que ce serait possible de garder pour toi le fait que je sorte avec Ace et que je suis le co-propriétaire ? Il précise : Disons qu’aux yeux de la société je ne suis que son ami qui n’a rien à voir avec son café et j’aimerais que ça reste comme ça. Je fais partie de la haute société et comme tu le sais, c’est plutôt compliqué d’assumer ces choses… Il n’ajoute rien, se mordillant un peu la lèvre.

Tic tac tic tac. L’aiguille saccadée, le temps s’écoule, la conversation est bien plus tranquille que celle de la dernière fois quand ils étaient chez lui. Malgré la fatigue et la difficulté actuelle pour se concentrer, Minki se sent bien, satisfait que l’offre plaise à l’australien, ne comprenant pas réellement pourquoi il était si inquiet à l’origine. Peut-être s’était-il imaginé que ce ne serait pas suffisant pour lui ? Mais est-ce le genre de Leslie de rechigner face à une telle proposition ? Après tout, il ne le connaît pas totalement, du moins il sait quel tempérament il peut avoir au vu de leur passé un peu conflictuel. Avant d’en rester là, il a une dernière demande, bien plus personnelle et difficile à ses yeux, lui qui aurait aimé vivre sa relation pleinement avec Ace se retrouve à devoir la limiter. La requête peut paraître étrange, cependant le bouclé ne semble pas porter de jugement péjoratif. Au contraire, il affiche un sourire, puis accepte et le soulagement éprend le reporter qui sent ses épaules s’affaisser. Pourquoi est-il aussi méfiant, même avec les personnes qu’il apprécie ? Sa paranoïa le hante depuis bien trop longtemps, malheureusement. Bien… qu’il déclare simplement, avant d’écarquiller un peu les yeux face à ce qu’il dit, ne s’y attendant aucunement. Il reste un instant silencieux, puis il finit par se mordiller la lèvre. Moi aussi. C’est pesant, je dois l’admettre… Un autre blanc, peu gênant à ses yeux, et finalement il se met à ranger la paperasse devant lui, soudainement agacé par le bordel envahissant. Ce n’est pas son genre, ça ne l’a jamais été, bien trop perfectionniste pour ça. Eh bien… je pense qu’on peut en rester là. Je n’ai rien d’autre de plus à te proposer. Je ne sais pas si tu as des questions ou si c’est bon pour toi aussi ? qu’il demande, enfin, le visage tout de même détendu malgré la frustration envers lui-même.