berceuse intime (marthias)

BERCEUSE INTIME

MARTHIAS 10

Et quand les yeux se ferment et que tout est noir, quand les mots se perdent ; Mathias, il est comme un gamin face aux mots délicats, raisonnant dans son palpitant, de la belle Marla. Eux, c’est l’évidence ; la violence d’un monde dans deux âmes amoureuses. A la recherche d’un bonheur imparfait, qui ne suffirait qu’à eux. L’un contre l’autre ; ou l’un dans l’autre, ils étaient à la fois un Yin et un Yang, dans cet équilibre fragile qu’ils représentaient. Il n’a pas senti son souffle s’apaiser, son cœur se calmer ; et il n’a surtout pas vu le sommeil l’emporter, dans un songe si platonique qu’à son réveil, lorsque les rayons de soleil ont caressé sa peau, il s’est demandé s’il avait réellement dormi. La chance, d’avoir un assoupissement des plus naturels : lui qui avait passé tant de temps à se tourmenter, la nuit, en essayant d’atteindre quelque chose qu’il convoitait tant. Les mains se perdent sur la brune, délicatement, dans ce genre de caresses qui réveille les cœurs et répare les âmes. Il sourit, son regard cherchant celui du double, dans l’espoir d’y trouver autant d’amour qu’à son coucher. « On va se baigner ? » Voix enrouée mais enjouée, à l’idée de construire quelques nouveaux souvenirs. Et les doigts glissent dans les cheveux, jouent avec une mèche.

Et se dire je t’aime, à travers quelques gestes.

(c) TORTIPOUSS.

BERCEUSE INTIME

MARTHIAS 10

Elle ouvrait les yeux, sur ce ciel bleu, sur l’astre incandescent, brûlant depuis quelques minutes, la surface de ses cuisses. Marla, elle ne bougeait pas, prenait des secondes pour émerger, sortir de ce sommeil réparateur. Le temps qu’il en sorte également, Mathias, après ces longues heures de route, se coupant de la civilisation, de l’agitation, pour se ressourcer. Prendre du temps pour eux, se découvrir davantage, quitter les habitudes et bousculer le quotidien, se voir, nus, dénués de protections, de barrières. Marla, elle avait les lippes en feu, l’envie de lui confier plus de sentiments, d’amour, autre que les étreintes, les regards, parce que les mots, ils faisaient du bien. Ils rassuraient, ils mettaient du baume au cœur, mais la jolie, elle était craintive, apeurée, tétanisée à l’idée de mettre les pieds dans le plat. C’était pour cette raison que la brune semblait ailleurs, l’esprit tourné vers autre chose que l’invitation. « Oui. » Qu’elle murmurait en se redressant, fouillant dans son sac en caressant Yogi, en train de dormir en plein soleil, sur le sol de la chambre. Le maillot enfilé, quelques affaires enfouies dans le sac et ils prenaient la voiture, laissant le chien tranquille, en direction des bains. Le trajet fut silencieux, avec une Marla à l’allure stoïque, dont l’intérieur était en feu, en ébullition. Face à eux, se dessinaient les sources thermales, ces quelques bains, dont émanaient de larges nuages de chaleur. Pas un chat à l’horizon. Et peut-être que ça la stressait, un peu plus, même en se déshabillant, délaissant les affaires sur le bord, elle s’enfonçait dans l’eau chaude. La tignasse retenue d’un élastique au motif zébré et le silence s’installait, les doigts tapotant la surface de l’eau chaude. Les muscles se détendaient, mais, Marla, elle était prise dans la spirale infernale du doute, de l’appréhension, de se livrer.

(c) TORTIPOUSS.

BERCEUSE INTIME

MARTHIAS 10

Il n’avait pas tout de suite fait attention aux allures de la belle : craintive, fuyante, silencieuse ; il était habitué et aimait les silences entre eux, comprenant chaque minutes de celui-ci. Il rompait le calme, avec quelques mots, pour rassurer les maux : mais plus elle se mouvait dans l’espace, plus il sentait les choses venir. Et la peur lui prit le ventre, tordant les boyaux et les tripes sur son passage : les sueurs froides dégoulinant dans le dos alors qu’il rentrait dans la voiture après avoir enfilé un maillot de bain et un simple tee-shirt. Il n’avait pas peur du froid, ni de la neige : se sentant dans son élément quand la glace caressait son épiderme. Il inspirait, laissant ce silence pesant s’installer : et le voilà lui aussi, à angoisser sans savoir pourquoi. Il hésitait à la toucher, se demandant ce qu’il avait bien pu faire de si mal : l’endroit était-il trop pour elle ? Lui, n’était-il pas assez ? Il n’en avait aucune idée. Et quand il a garé la voiture, qu’il est descendu en lui souriant et qu’elle n’a pas daigné répondre -sûrement trop dans ses pensées, tout s’est envolé : la joie d’être ici, la joie d’être lui-même, et même la joie d’être en vie. Il la sentait fébrile sur leur fil, alors il ne disait rien, de peur qu’elle chute un peu trop fort. Les vagues à la surface.

La tempête dans le cœur.

(c) TORTIPOUSS.

BERCEUSE INTIME

MARTHIAS 10

L’estomac noué de cette peur, du grand plongeon dans l’inconnu. La phobie de perdre l’être aimé, de rester sur le bord de la route, d’assister à un énième abandon. La peur au ventre. Mathias, il avait tendance à partager la moindre de ses émotions, à faire de sa peur ou de ses doutes, les siens, quitte à sombrer avec elle, à ses côtés. Symbiose parfaite et totale de leurs essences emmêlées, entrelacées. Elle gardait le silence, respirait un peu moins bien, même si le cadre avait tout de parfait, d’idyllique. Les minutes passaient : l’on dirait de parfaits inconnus, à ne pas se regarder ni se parler. Des êtres qui n’avaient rien à voir ensemble. Les lèvres s’ouvraient, mais rien ne n’échappait, rien ne passait la frontière des lippes rosées. Oui ou non ? Elle l’ignorait, se perdait dans l’océan de ses pensées en vrac, désastreuses. Celles qui doutaient, qui avaient peur, de le bouleverser, de le chambouler. « J’ai quelque chose à te dire. » Qu’elle murmurait en se pinçant les lèvres, tendant ses phalanges vers les siennes : de quoi enlacer ses doigts des siens, le mettre à l’aise, même si ce qu’elle s’apprêtait à dire risquait de changer la donne.

(c) TORTIPOUSS.

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C’était comme ça entre eux : un instant, tout semblait être parfait, un paradis sur terre ; et la violence des existences reprenait le dessus et plus rien ne semblait aller. Le paradis avait des allures d’enfer et leur lien semblait fragile. En dépit de tout l’amour qu’ils avaient l’un pour l’autre, ils s’amusaient involontairement à tout foutre en l’air à chaque fois que tout se présentait un peu trop bien. Se lassant, se laissant, sans même savoir comment survivre sans l’autre. Mathias, il regardait les petites vagues sur la surface de l’eau. Marla, elle provoquait les vagues. Et c’était un beau tableau de deux inconnus : mais qui résumait bien la relation de ces deux êtres. Quand l’un provoquait un tsunami, l’autre attendait que ça revienne à la normale. Jusqu’au prochain … La main se tend, les doigts s’attrapent et le cœur s’allège. Mais les mots en l’air réveillent les maux profonds, enfouis au plus profond de l’homme. « Oui ? » Souffler, avec peur, avec appréhension. Et se poser milles questions. Va-t-elle partir ? L’a-t-elle vu comme il est réellement ? Comme il se voit lui-même ? Il déglutit, est prêt à affronter quelques mots qui vont le détruire, probablement. Parce que Mathias sans Marla, on ne se rappelle plus vraiment ce que c’est.

Ne m’dis pas que tu vas partir Marla, parce que j’suis rien sans toi.

(c) TORTIPOUSS.

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MARTHIAS 10

Les doigts s’enlaçaient, étirant en même temps, un sourire le long de ses pulpes charnues. L’émotion sommeillait en elle, ne tarderait pas à montrer le bout de son nez. À couvrir ses pommettes rosées de perles humides, de larmes, loin d’être tristes ou désespérées. Elle n’arrivait pas encore à parler, cherchait le courage nécessaire, en serrant sa main, en s’approchant un peu plus de lui. Qu’il capte ses prunelles, aussi bleues que les siennes. Qu’il comprenne qu’il n’y avait rien d’important ou de dramatique. Qu’elle ne s’en allait pas, qu’elle restait, mais les émotions, c’était difficile pour la gamine. Habituée à tout refouler, pour ne pas se surcharger, certaines choses étaient plus délicates que d’autres. Ses yeux dans les siens, Marla glissait ses petites mains sur la surface de ses mains, remontant jusqu’à sa nuque. Délicates caresses jusqu’à sa chevelure mi-longue, dont son index retraçait sa raie au centre. « Je t’aime tellement, Thias. » Qu’elle murmurait d’une voix tremblante. « Tu m’as sauvé la vie... » Alors que ses prunelles s’humidifiaient et que ses doigts glissaient dans la tignasse brune de son amour, elle parlait, comme elle ne l’avait jamais fait auparavant. « Je t’aime, du plus profond de mon être. J’veux être avec toi. J’veux t’aimer jusqu’à crever. » La voix flanchait, émotive. « Mat, je t’aime, putain qu’est-ce que je t’aime. » Et ses yeux retrouvaient ceux de Mathias, de cette étreinte éternellement amoureuse, fusionnelle.

(c) TORTIPOUSS.

BERCEUSE INTIME

MARTHIAS 10

Et tout semble si fragile, à cet instant précis : que le vent souffle un peu trop fort et vous voilà balayer par la vie. Les obstacles. L’amour. Les prunelles cherchent et trouves, l’océan qui parvient à le calmer. Mathias, il peine à savoir ce qui l’attend : il se demande par milles questions ce qu’il a bien pu faire pour en arriver à ce moment précis. Le moment où elle se rend compte qu’il n’est pas grand-chose, si ce n’est un grand rien dans une putain de vie à la con. Il déglutit, peine à dire quelques mots, ne sait même pas s’il veut entendre la suite. Mais finalement, Marla, elle se rapproche : si lentement qu’il se croit dans un film ; si lentement qu’il entend et ressent la moindre secousse de l’eau. Les mains retrouvent l’épiderme dans le genre de caresses à devenir fou. Et finalement, les mots. Si violent. Si efficace. Véritable pansement d’une humanité à peine révélée. Il sourit. Un peu. Ne cache ni son amour, ni le tambour dans sa poitrine : c’est le bordel dans sa tête. Il tente de ne pas se noyer sous ce flot d’émotions, de mots, de maux réparés. Mathias, il se demande si tout ça est vrai, si elle ne va pas juste s’évanouir dans la nature : cadeau des dieux reprit, une fois que tout est passé. Peut-être simplement pour survivre à quelque chose de trop tragique ? Il panique un instant. Laisse le silence. Pour finalement balancer. « Epouse-moi. » Cri du cœur. Alarme de l’âme.

(c) TORTIPOUSS.

BERCEUSE INTIME

MARTHIAS 10

Le souffle se coupait, plus elle s'approchait de lui. Son corps sur le sien, Marla, elle le regardait. Elle prenait le temps de le caresser, de l'apaiser, des tourments qui le prenaient, depuis qu'elle s'était fermée. De peur. De frustration. En se rendant compte, qu'elle avait du mal à prononcer les mots importants, ceux qui rassuraient, faisaient du bien. Trop pudique et apeurée, à l’idée d’en faire trop, pas assez. Il y avait tout un univers de doutes, dans sa caboche, même si elle donnait tout. Marla, généreuse. Marla, aimante. Il n’y avait pas de retenue pour Mathias, parce qu’il valait tous les sacrifices, tous les efforts. Alors, pour lui, elle brisait sa carapace, franchissait ses limites, en lui disant tout ce qu’elle ressentait. Du plus simple au plus brut des sentiments, il n’y avait pas de peur. Que le silence de Mathias, qui lui secouait l’estomac, lui faisait peur. Suivi du choc de sa demande, parce qu’elle avait un bug, Marla. La belle reculait légèrement, le fixait, l’air de demander s’il était sérieux, s’il le pensait. De longues minutes à se taire, à se poser des questions. Et finalement… « D’accord. » La risette éclatante aux lèvres, qu’elle affichait, Marla, ses mains sur ses joues. C'était bien la première fois qu'on lui demandait sa main et cela la chamboulait assez. Elle avait aussi peur, Marla, à réfléchir, à se dire que ça allait vite, qu'il finirait par regretter, se lasser de sa compagnie. La peur de tout faire foirer, de l'envahir, de prendre trop ses marques dans sa vie et d'aller droit dans le mur. Mais, le sourire de Mathias ? Il apaisait tout, taisait les démons qui parasitaient son esprit, en le regardant, de ses mirettes brillantes d'émotion, d'amour, pour ce garçon.

(c) TORTIPOUSS.